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mardi, décembre 15, 2015

Deux ans plus tard, les atrocités se poursuivent au Soudan du Sud

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Mise à jour le mardi 15 décembre 2015 à 12 h 07 HNE  Radio-Canada avec Agence France-Presse
Une école aménagée dans un camp de réfugiés de Juba, au Soudan du Sud.
Une école aménagée dans un camp de réfugiés de Juba, au Soudan du Sud.  Photo :  Andreea Campeanu / Reuters

Bien qu'un accord de paix ait été signé au Soudan du Sud, qui a déclaré son indépendance en 2011, le plus jeune État du monde est toujours à feu et à sang deux ans après le début du conflit.
Les premiers affrontements ont éclaté le 15 décembre 2013 entre les camps des deux dirigeants du nouveau régime du Soudan du Sud, issus des ethnies Dinka et Nuer. Les deux groupes ont procédé à des massacres ethniques, faisant environ 50 000 victimes jusqu'à aujourd'hui.
Un conflit « atroce » 

D'innombrables atrocités ont été commises par les deux camps depuis le début du conflit. Des massacres ethniques au cours desquels des hommes, des femmes, et des enfants ont été assassinés, des hommes ont été castrés, des femmes et des fillettes ont été enlevées, réduites en esclavage et systématiquement violées, des enfants ont été égorgés et jetés vivants dans des maisons en feu.
Depuis, plus de 100 000 Sud-Soudanais vivent toujours dans les 26 camps de réfugiés de l'ONU situés majoritairement au nord et à l'est du pays. Aussi, plus de deux millions d'habitants ont été chassés de chez eux, trouvant la plupart du temps refuge dans la nature.
Le plus gros camp de réfugiés, celui de Yida, qui borde la frontière soudanaise, recensait plus de 70 000 réfugiés en novembre 2015, selon les chiffres de l'ONU. Les camps recueillent aussi des Soudanais, des Congolais, des Éthiopiens et des Centrafricains.
Les camps sont complètement coupés de l'extérieur, surpeuplés et insalubres. Bien que les réfugiés soient à l'abri de la violence, les tensions à l'intérieur des camps sont vives, rapportait en août dernier le journal français L'Humanité.
« Il n'y a aucune liberté », dit Bong Kubuong, 39 ans, un père de trois enfants qui habitent un de ces camps. « Nous restons ici avec l'espoir qu'un jour les choses changeront », ajoute-t-il.
L'homme passe ses journées à tourner en rond : « vous pouvez vous balader à l'intérieur du camp, mais sans sortir, parce que sinon vous pouvez être tué ».
Seul endroit sécuritaire du pays, les camps recueillent principalement les Sud-Soudanais de l'ethnie Nuer. 
« Ils cherchaient en faisant du porte-à-porte et quand ils découvraient que vous étiez un Nuer, ils vous tuaient », se souvient Deng Diang Chuol, assis dans un camp de Juba avec son fils.
Un accord de paix bafoué
Un accord de paix a finalement été signé le 26 août 2015, après la violation de plusieurs cessez-le-feu. Malgré tout, les violences ne se sont pas estompées et les deux camps n'ont pas respecté leurs engagements.
Human Rights Watch a déclaré mardi que les conflits s'étaient multipliés et a prévenu que « malgré l'accord de paix, il est probable que la violence et les combats vont continuer ».
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a déclaré en novembre dernier que le non-respect du calendrier de l'accord jetait un doute « sur la détermination à appliquer le processus de paix ».
L'accord de paix n'a pas redonné espoir aux réfugiés des camps de l'ONU. « Nous espérions sortir du camp [...], mais on ne va pas le faire parce qu'on a encore peur. On a peur de n'être toujours pas en sécurité », explique le réfugié Deng Diang Chuol.
« Nos espoirs sont minces. Cet accord de paix semble n'exister que sur le papier. Rien n'indique qu'il va être appliqué. »— Deng Diang Chuol, réfugié d'un camp de Juba
« Ce qui existe sur le papier ne peut prendre forme que si les dirigeants font preuve de la volonté politique de le mettre en oeuvre et arrêtent de faire souffrir des Sud-Soudanais innocents », dénonce Edmund Yakani, un militant de la société civile à Juba.
Selon Zlatko Gegic, responsable d'Oxfam au Soudan du Sud : « Quatre mois après la signature de l'accord de paix, pas grand-chose n'a changé [...] Des vies ont été détruites et beaucoup n'ont presque rien pour survivre ».
La famine à l'horizon
En plus des conflits sanglants qui ont toujours cours, la famine s'ajoute au fardeau des Sud-Soudanais.
Les personnes qui ont trouvé refuge dans la nature se rassemblent près des marais où les seules sources de nourriture sont des racines. De plus, la plupart des marchés du pays ont été détruits de même que les terres agricoles.
L'ONU a affirmé que sans aide d'urgence, plus de 30 000 personnes risquaient de mourir de faim dans les régions les plus ravagées par la guerre civile, en octobre dernier.
La crise alimentaire est qualifiée d'« alarmante » par la Croix-Rouge et la situation au pays, de « chaotique et dangereuse ».
Pour le moment, l'état de famine n'a pas encore été déclaré, même si le nord et l'est du pays s'en approchent dangereusement. En 2014, la famine a été évitée de peu grâce à des distributions de nourriture par la voie aérienne.
De plus, les mauvaises conditions sanitaires et les services de santé rudimentaires font resurgir des maladies graves, tels que le choléra. Freinée en 2014 grâce à une campagne de vaccination et des mesures de prévention, cette infection bactérienne connaît une recrudescence dans les camps de réfugiés.
Plus de 1500 cas ont été recensés à Juba et dans la ville de Bor, dont 40 décès.