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mercredi, septembre 30, 2015

Affaire KPMG : au moins 25 multimillionnaires canadiens visés

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Les bureaux de KPMG à Vancouver
Les bureaux de KPMG à Vancouver  Photo :  ICI Radio-Canada

Exclusif - Au moins 25 riches clients du cabinet comptable KPMG ont employé un stratagème qui, selon l'Agence du revenu du Canada (ARC), visait à tromper le fisc. Des négociations pour régler le dossier à l'amiable sont suspendues. La cause devra être entendue en Cour fédérale.
Un texte de Frédéric ZalacTwitterCourriel, Harvey Cashore et Dave Seglins
Depuis plus de deux ans, KPMG refuse de remettre aux autorités fiscales une liste de multimillionnaires canadiens soupçonnés d'avoir trompé le fisc. Ces clients auraient transféré leurs avoirs à des sociétés-écrans dans l'île de Man, dont les actionnaires étaient des prête-noms.
L'Agence du revenu a obtenu l'autorisation d'un juge pour forcer KPMG à divulguer leur identité, mais le dossier est au point mort depuis 2013.
Il y a trois semaines, l'émission Enquête et CBC ont révélé que le cabinet comptable était en pourparlers confidentiels avec le ministère de la Justice et la ministre du Revenu dans le but de régler la question à l'amiable.
Ces négociations viennent d'être suspendues.
Dans une lettre déposée hier en Cour fédérale, un avocat représentant KPMG, Mahmud Jamal, indique que la cause devra procéder devant le tribunal. « Il a été déterminé qu'une audience sera nécessaire à cet égard », écrit-il.
Jusqu'à maintenant, KPMG avait refusé d'indiquer combien de ses richissimes clients avaient profité du stratagème de l'île de Man.
Des fortifications à l'île de ManDes fortifications à l'île de Man  Photo :  ICI Radio-Canada
Selon un document interne de KPMG, la clientèle visée devait avoir au moins 10 millions de dollars à investir à l'étranger. Le cabinet comptable promettait l'accumulation d'actifs et d'investissements libre d'impôt et en toute confidentialité.
Dans la lettre de KPMG, on apprend qu'une quinzaine de clients se sont identifiés au fisc après qu'ils eurent appris que l'ARC faisait enquête. Les autorités fiscales ignorent encore l'identité d'au moins six clients et KPMG refuse toujours de leur remettre les noms.
Les seuls clients dont l'identité est connue publiquement sont les membres de la famille Cooper de Victoria, en Colombie-Britannique. En 2002, Peter, Marshall et Richard Cooper ont transféré 26 millions de dollars à une société enregistrée à l'île de Man. Ils ont déclaré des revenus dérisoires au fisc et ont payé peu ou pas d'impôt.
L'Agence du revenu a découvert un autre client, portant le nombre de multimillionnaires visés à au moins 25.
Dennis HowlettDennis Howlett  Photo :  ICI Radio-Canada
Porte de sortie facile?
Dennis Howlett, le directeur du groupe Canadiens pour une fiscalité équitable, croit qu'il est grand temps que cette cause soit entendue devant un tribunal. « Si nous n'avions pas été au milieu d'une élection, je crains qu'ils auraient réglé à l'amiable et que tout aurait été dissimulé », pense-t-il.
Selon Dennis Howlett, la quinzaine de clients qui se sont identifiés auprès du fisc ont possiblement eu recours au Programme des divulgations volontaires de l'ARC. Ce programme permet aux contribuables de divulguer après coup des sommes non déclarées sans devoir faire face à des pénalités ou des poursuites criminelles. Seulement les sommes dues et les intérêts sont alors réclamés.
« C'est préoccupant. C'est beaucoup trop facile pour eux de s'en tirer à bon compte. Si vous vous faites pincer, vous n'avez qu'à payer ce que vous deviez au départ. »— Dennis Howlett, directeur du groupe « Canadiens pour une fiscalité équitable

En plus d'obtenir la liste complète des clients, Dennis Howlett croit que le gouvernement devrait concentrer ses efforts sur le cabinet comptable lui-même. Selon lui, il est important que les pratiques fiscales douteuses de KPMG fassent l'objet de procédures judiciaires.
« Les gens bien nantis et les grandes entreprises ne pourraient pas cacher leurs avoirs dans des paradis fiscaux sans l'aide de fiscalistes comme ceux de KPMG. Le gouvernement doit envoyer un message clair que ce genre d'activité n'est pas toléré. »— Dennis Howlett, directeur du groupe « Canadiens pour une fiscalité équitable