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jeudi, avril 02, 2015

Lente agonie

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PHOTO FOTOLIA
CA_Tania-Longpre
J’ai enseigné quelques mois dans une école primaire francophone, en banlieue de Vancouver, en Colombie-Britannique. Francophone cosmétiquèrent, disons. Les enfants ne parlaient qu’anglais dans la cour d’école et dans les couloirs. On devait élaborer un système d’émulation afin qu’ils utilisent le français hors de leur classe, quand ce n’était pas dans celles-ci. Leurs parents ainsi que mes collègues étaient majoritairement des Québécois expatriés. 
 J’avais par contre une collègue camerounaise, nouvellement installée au Canada. Elle se désolait qu’après quelques mois, ses enfants délaissaient déjà leur français. Se plaignait qu’on lui avait dit que le Canada était bilingue, mais qu’elle avait découvert une ville anglophone. Il n’était pas surprenant que ses enfants soient aussi attirés par l’anglais puisque c’était la langue utilisée par leur communauté d’accueil, la langue de leurs nouveaux amis ou celle du dépanneur du coin. Le français lui ? Malheureusement inexistant. Dans les facteurs de motivation poussant un individu à apprendre une langue, on trouve la « vitalité de la communauté », soit l’influence du milieu : plus une langue est utilisée dans un emplacement géographique, plus on sera porté à l’utiliser.
 Attirer davantage d’immigrants francophones  à l’extérieur du Québec serait, pour certains, une panacée qui éradiquerait le déclin des communautés francophones. Un voeu pieux. 
 Dans un article de Radio-Canada, Marie-France Kenny, présidente de la FCFA s’en prenait au gouvernement en critiquant le fait que 98 % des immigrants à l’extérieur du Québec étaient anglophones ou connaissaient l’anglais. Citée dans le texte de Radio-Canada, elle mentionnait ceci : « On voudrait tuer la francophonie canadienne à petit feu, éliminer nos communautés par attrition qu’on ne pourrait pas mieux s’y prendre. » En fait, la réalité, c’est que l’immigration ne viendra pas résoudre cette catastrophique problématique qu’est l’effondrement démographique des francophones hors Québec.  

 
Le rêve de Trudeau père relève aujourd’hui d’un fantasme irréaliste : le Canada est de moins en moins bilingue.
Alors qu’en 1971, 4,3 % de la population canadienne hors Québec utilisait le français comme langue maternelle à la maison, ils n’étaient plus que 2 % lors du recensement de 2006. La situation est cauchemardesque. La mort lente des populations francophones hors Québec est un vrai désastre culturel. Ceux qui s’accrochent à les faire survivre sont de vrais combattants dédiés à la plus belle des causes : le maintien de la diversité linguistique et culturelle. Par contre, miser sur l’immigration n’était qu’un échec annoncé : en effet, lorsqu’un francophone s’installe dans une zone géographique, il utilisera naturellement la langue de la communauté, la langue d’utilité afin de se joindre à sa nouvelle communauté. Si cette langue est l’anglais, il n’hésitera pas une seconde à l’apprendre, et ce, même s’il est francophone. 
 Il constatera alors que le pays bilingue qu’on lui avait vanté n’existe que dans les hautes sphères des ministères, dans certains bureaux de poste ou dans les trains de Via-Rail. Que ce bilinguisme n’est que parure cosmétique. Le hochet qu’était la prétendue venue de l’immigration francophone comme antidote n’était en fait qu’un grossier mensonge, comme l’est le Canada bilingue, et ce fait divers est symptôme d’une problématique probablement irréversible : la mort du Canada français, lentement mais surement, telle une lente agonie.